Desintox: malheureusement les électeurs néerlandais n’ont PAS rejeté Geert Wilders

Pétition.
Pétition.
C’est ridicule. Avaaz fait circuler une pétition pour remercier le “peuple néerlandais” (quel que soit le sens de ce mot) pour “avoir choisi l’espoir, l’unité et le dialogue contre la haine, la peur et la vieille rhétorique fasciste”. Ils prétendent même que “en rejetant Geert Wilders, vous avez contribué à arrêter partout l’ascension de l’extrême droite”. Plus généralement, la couverture de ces élections dans la presse internationale a été un désastre complet.

Je rédige donc une note rapide pour mes amis internationaux, juste afin de m’assurer que vous sachiez tous ce qui se passe aux Pays-Bas, en ce moment.

The original text in English. Translated by Yves Coleman for Ni patri nu Frontières.

Tout d’abord: à mon grand regret, les électeurs néerlandais n’ont PAS rejeté Geert Wilders. Il a en réalité GAGNE cinq sièges au Parlement. Il est vrai que, pendant longtemps, les sondages prévoyaient qu’il obtiendrait un plus grand nombre de voix (voire même qu’il gagnerait les élections). Au lieu de cela, le PVV de Wilders est arrivé en deuxième position. Mais son pouvoir au parlement a augmenté, et c’est donc une grave exagération d’affirmer qu’il aurait été “rejeté”.

Deuxièmement, la raison pour laquelle Wilders a remporté moins de sièges que prévu, c’est parce que le parti de la droite libérale, le VVD (qui est dirigé par le Premier ministre Mark Rutte) a largement adopté le discours raciste et islamophobe de Wilders. Le récent conflit avec le gouvernement turc a également aidé Rutte à se présenter comme un leader “dur” qui est prêt à prendre des décisions controversées aux dépens des minorités culturelles (islamiques) aux Pays-Bas. Plus généralement, au cours de ses campagnes électorales, le VVD a tenté de se présenter comme une force plus modérée et plus compétente que le parti populiste de Wilders. Mais ses opinions sur les migrations, la diversité culturelle, le racisme systémique ou la crise actuelle des réfugiés ne sont guère plus progressistes ou inclusives que celles de Wilders. Le VVD a collaboré étroitement avec le PVV dans le passé (ai-je mentionné que Wilders fut autrefois l’un des députés les plus en vue du VVD, avant de le quitter pour fonder son propre parti?) Et je suis sûr que les dirigeants du VVD coopéreront encore avec Wilders dans les années à venir, chaque fois que cela servira leurs intérêts. Ainsi, encore une fois, la victoire électorale de Rutte ne peut guère être interprétée comme un “rejet” du PVV.

Enfin, de nombreux médias internationaux n’ont pas remarqué que la gauche parlementaire a atteint un niveau record… mais particulièrement bas. Tous les partis de gauche réunis (et j’utilise ici le terme de “gauche” au sens le plus large possible) n’ont que 46 sièges (sur 150). Plus important encore, le PvdA social-démocrate (qui a toujours été l’un des principaux partis depuis la Seconde Guerre mondiale) a perdu 29 sièges. Les socialistes du SP (un ex-parti maoïste qui est favorable au contrôle de l’immigration, NdT) en ont perdu un aussi. Les Verts ont gagné un nombre significatif de sièges (ils sont passés de quatre à quatorze députés), mais c’est beaucoup moins que ce que tous les partis de gauche réunis ont perdu. En outre, il convient de noter que la popularité de Wilders a conduit à la montée de divers autres partis d’extrême-droite. L’un d’entre eux – le “Forum pour la démocratie” de Thierry Baudet – a également remporté deux sièges.

En bref, le Parlement néerlandais n’a jamais été plus de de droite, nationaliste et raciste qu’aujourd’hui. Il y a très peu de raisons de célébrer – et encore moins de remercier le “peuple néerlandais”, pour “avoir choisi l’espoir, l’unité et le dialogue”. Ce dont nous avons besoin, dans les années à venir, c’est d’une opposition militante et extra-parlementaire. Et pas de pétitions stupides célébrant encore une autre prétendue victoire contre la droite néolibérale.

Mathijs van de Sande